Depuis plusieurs
décennies, le processus démocratique dans plusieurs grands pays
européens ne parvient plus à réaliser un nombre considérable
d’objectifs de la société. En plus, cette incapacité a ébranlé la
confiance des citoyens dans la classe politique et pire encore dans le
bon fonctionnement du système démocratique dans sa forme traditionnelle.
Un des raisons
essentielles est que les conditions du bon fonctionnement de la
démocratie n’ont pas été adaptées pari passu avec les changements
profonds de la société.
Deux grandes défaillances
ont des incidences majeures sur les sociétés de nos jours :
- L’accroissement de
l’intensité de capital, c’est-à-dire du stock de capital fixe par
personne (machines, bâtiments, infrastructures), a allongé la période
de gestation de beaucoup de projets politiques au-delà de la période
législative. En d’autres termes : À nos jours ce sont
essentiellement les effets de démarrage (plutôt pénibles) d’un projet
qui se manifestent pendant la législature en cours et les effets
bénéfiques ne peuvent être attendus qu’au cours de législatures
suivantes. Dans ces conditions, la peur des politiques de perdre les
prochaines élections les empêche à mettre en œuvre les réformes
profondes nécessaires.
- Le système d’éducation
n’a pas assez évolué pour correspondre aux nouvelles exigences issues
des transformations récentes de la société. Ainsi on constate des
lacunes graves pour former
- des citoyens capables et
soucieux d’assumer leurs responsabilités et
- des politiques disposant
des capacités indispensables pour leurs fonctions
Dans ces conditions,
l’action politique se manifeste trop souvent dans une multitude de
décisions ad hoc et/ou ponctuelles
- privilégiant souvent l’un
ou l’autre groupe corporatiste
- sans prise en compte
adéquate de l’intérêt général à moyen et long terme
- sans exploitation
correcte de l’expertise des services
- sans coordination réelle
(entre matières et institutions)
- sans mise en œuvre
véritable ni suivi des réalisations
- sans coopération
suffisante entre services et/ou
- sans application
rationnelle des instruments existants
Ils en résultent inévitablement
- un manque du respect de
l’intérêt général à moyen et long terme
- sur le plan
organisationnel
- des structures politiques
inadaptées, notamment la possibilité d'une paralyse mutuel des
institutions politiques
- un manque de transparence
des réglementations et institutions, accompagnées d’une complexité que
parfois même les experts en la matière en peuvent plus maîtriser
- une longueur des
procédures administratives et juridiques
- des conditions
économiques et sociales incitent à des comportements improductifs,
hasardeux et défiant tout civisme, suivie trop souvent de leur
quasi-impunité
L’inadaptation du système d’éducation conduit
- sur le plan de
l'éducation civique des citoyens, à une importance et attention tout à
fait insuffisante attachée
- à un consensus de base
concernant la société et de ses principes de fonctionnement
- aux analyses
macro-économiques du pays et de son évolution à long terme (ex post et
ex ante)
- aux incidences des faits
économiques et sociaux sur le bien-être général à moyen et long terme
- à l’encadrement global de
la société, notamment de la concurrence
- aux mécanismes
d’incitation, d’allocation et de redistribution ainsi qu’a leurs moyens
et incidences
- sur le plan de l’aptitude
des politiques
- à leur manque de
compétence et de crédibilité (ensemble avec des scandales politico
financières)
- à leur comportement
électoraliste (promesses irréalisables, incompatibles avec d'autres
engagements ou non tenues)
Les citoyens sont déçus et abusés. Ils ne voient guère de possibilité
pour infléchir réellement le cours des événements. Ceux qui néanmoins sont
intéressés par la politique ne trouvent pas, dans l'offre des partis en
place, un projet cohérent visant l'intérêt général et promettant une
efficacité à long terme. Pour exprimer leur
mécontentement, voire leur dégoût de la politique, beaucoup de citoyens
recourent de plus en plus à l'un ou
l'autre des moyens suivants :
- abstentions aux élections
- vote nul ou protestataire
- vote pour l'un ou l'autre
parti de l'opposition sans espoir réel qu'il réalisera mieux l'intérêt
général à long terme.
Pour obtenir la majorité des voix, les partis de l'opposition peuvent
dans beaucoup de cas se contenter de simplement critiquer l'attitude
des partis au pouvoir sans eux-mêmes devoir présenter des propositions
concrètes, voir un programme cohérent. Souvent les élections ne
conduisent qu'à une alternance de partis politiques au gouvernement,
partis qui avaient déjà prouvé antérieurement - lorsqu'ils étaient au
pouvoir - leur incapacité d'affronter valablement les problèmes non
résolus depuis longtemps.
La déception à l'égard du
nouveau gouvernement s'installe parfois si rapidement que les citoyens
utilisent la première occasion pour exprimer leur mécontentement, même
- si ces
élections concernent une autre instance publique et
- si des
majorités différentes dans plusieurs instances conduisent quasiment à
leur paralysie mutuelle.
L’ensemble de ces
facteurs a compromis une gestion rationnelle des affaires publiques et
rend impossible une politique efficace dans l'intérêt général à moyen
et long terme. Depuis plusieurs décennies ils conduisent plutôt à la non-réalisation de plusieurs objectifs
essentiels de la société, comme
- un consensus global sur
les objectifs et moyens de la société
- un haut dégrée d’emploi
- le maintien des
différences dans la répartition des revenus et des patrimoines dans les
proportions nécessaires pour la fonction d'incitation
- une sécurité
satisfaisante des citoyens
- la stabilité du système
financier
- le maintien de
l’environnement
- la maîtrise du
vieillissement de la population
En somme,
le résultat est un important gain manqué du bien-être général sur une
longue période.
Si des
réformes profondes de nos comportements, procédures et institutions
n'interviennent pas rapidement, le danger s'accroît que les
défaillances dans le fonctionnement de notre système démocratique
conduisent à des bouleversements beaucoup plus néfastes encore que les
défaillances actuelles ou même mettent en péril l'ordre constitutionnel
libéral et démocratique.
Au cours
des dernières décennies, les réformes restant absent ont atteint une
telle ampleur qu'aucune formation politique ne peut plus oser de les
proposer, voir de les mettre en œuvre. Sinon, compte tenu de l’état
actuel de la formation des citoyens, la perte du pouvoir lors des
prochaines élections est quasiment assurée.
Pour ces raisons, il est
quasiment impossible que des projets d'envergure puissent émaner du
milieu politique actuel (partis politiques, Parlement, gouvernement).
Ils doivent être élaborés et proposés par des citoyens et les
organisations de la société civile. D'où le besoin d'une réflexion sur
les conditions (et autres préalables) d'une démocratie efficace dans
nos grandes sociétés ouvertes et hétérogènes, conditions qui tiennent
également compte des nouvelles exigences au début de ce siècle.
Pour lire
une ébauche de ces conditions cliquez ici.
Une comparaison de ces conditions avec la réalité indiquera le type et
l'ampleur des réformes nécessaires.
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